Page:Mercure de France tome 006 1892 page 239.jpg
(→Non corrigée) |
|||
Ligne 2 : | Ligne 2 : | ||
− | </noinclude> | + | </noinclude><center>ELAINE</center><br /> |
− | + | ||
− | + | L'allée est droite, obscure et pleine de pervenches. | |
− | + | Dans le corsage étroit d'une robe à longs plis, | |
− | + | Et les deux bras chargés des lys qu'elle a cueillis, | |
− | {{ | + | La svelte et pure Elaine apparaît dans les branches.<br /> |
+ | Un essaim de ramiers rôde autour de ses hanches, | ||
+ | Blanc essor attiré par la blancheur des lys; | ||
+ | Au loin, sur l'or rosé d'un ciel aux tons pâlis, | ||
+ | Le manoir d'Astolat et ses tourelles blanches.<br /> | ||
+ | Elaine, aux yeux d'aurore, au rire humide et frais, | ||
+ | A sa place marquée aux jardins des cyprès; | ||
+ | Elaine avec les lys sera morte à l'automne.<br /> | ||
+ | Elaine est destinée aux éternels regrets, | ||
+ | Et, présageant l'ennui d'une fin monotone, | ||
+ | Pâle et froide à ses pieds, fleurit une anémone.<br /> | ||
+ | |||
+ | |||
+ | <center>GENÈVRE</center><br /> | ||
+ | |||
+ | Dans l'implacable orgueil d'un royal adultère, | ||
+ | Genèvre, l'œil aride et les seins empourprés, | ||
+ | Le long de la terrasse aux parapets dorés | ||
+ | Promène son ennui hautain et solitaire.<br /> | ||
+ | Elle songe a l'abîme où, degrés par degrés, | ||
+ | Morne elle est descendue, au clos du monastère | ||
+ | Où mûrira sa faute, et les fleurs du parterre | ||
+ | Font pleuvoir sous ses doigts leurs boutons massacrés.<br /> | ||
+ | Elle songe A. sa gloire au milieu des huées | ||
+ | S'écroulant, aux pudeurs de son lit remuées, | ||
+ | A sa honte en pâture offerte aux courtisans;<br /> | ||
+ | Elle songe à ses yeux, autrefois méprisants, | ||
+ | Et sur sa robe étroite, où pas un pli ne bouge, | ||
+ | Sinistre et douloureux saigne un large iris rouge.<br /> | ||
+ | |||
+ | {{right|JEAN LORRAIN.}} | ||
+ | {{right|(D'après les Idylles du Roi, de TENHYSON.)}}<noinclude> | ||
</div></noinclude> | </div></noinclude> |
Version du 13 novembre 2014 à 15:15
L'allée est droite, obscure et pleine de pervenches.
Dans le corsage étroit d'une robe à longs plis,
Et les deux bras chargés des lys qu'elle a cueillis,
La svelte et pure Elaine apparaît dans les branches.
Un essaim de ramiers rôde autour de ses hanches,
Blanc essor attiré par la blancheur des lys;
Au loin, sur l'or rosé d'un ciel aux tons pâlis,
Le manoir d'Astolat et ses tourelles blanches.
Elaine, aux yeux d'aurore, au rire humide et frais,
A sa place marquée aux jardins des cyprès;
Elaine avec les lys sera morte à l'automne.
Elaine est destinée aux éternels regrets,
Et, présageant l'ennui d'une fin monotone,
Pâle et froide à ses pieds, fleurit une anémone.
Dans l'implacable orgueil d'un royal adultère,
Genèvre, l'œil aride et les seins empourprés,
Le long de la terrasse aux parapets dorés
Promène son ennui hautain et solitaire.
Elle songe a l'abîme où, degrés par degrés,
Morne elle est descendue, au clos du monastère
Où mûrira sa faute, et les fleurs du parterre
Font pleuvoir sous ses doigts leurs boutons massacrés.
Elle songe A. sa gloire au milieu des huées
S'écroulant, aux pudeurs de son lit remuées,
A sa honte en pâture offerte aux courtisans;
Elle songe à ses yeux, autrefois méprisants,
Et sur sa robe étroite, où pas un pli ne bouge,
Sinistre et douloureux saigne un large iris rouge.
JEAN LORRAIN.
(D'après les Idylles du Roi, de TENHYSON.)