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Mille affinités existent entre ces trois génies d'origine commune presque. Comme ses aînés, Moréas a tenté la renaissance gréco-latine et de ramener l'azur et le soleil dans notre littérature menacée de trop de brouillards. Il a tenté même davantage. Il a poursuivi dans les idées et les sentiments, comme dans la prosodie et le style, la communion du moyen-âge et de la renaissance. Il a voulu que, par lui, prit fin cette hostilité du mysticisme et du paganisme dont la lutte s'est perpétuée implacable durant des siècles, et que son œuvre en fût comme le trait d'union. S'il était vrai que Moréas eût réussi dans cette tâche, il serait plus qu'un homme, il serait un dieu. Notre admiration serait sacrilège d'aller jusque-là. Accordons-lui que de ces deux principes ennemis il a fondu en lui non pas l'esprit mais la lettre, et ce ne sera pas lui faire un mince éloge — non, certes !
Ernest Raynaud.