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austère de toute parure, la nudité d'une langue cursive et initiale : aucune épreuve n'est plus redoutable que celle-là, s'exposer sans armure d'ombres au monstre populaire, et il y faut la souriante tranquillité d'un héros. Tel en d'inoubliables causeries du soir, pour quelques-uns pleins de respect et d'affection, tel ici le Poète parle à tous, mais ayant renoncé à l'incantation de la voix, à la douce tyrannie du geste ; et cependant les mots gardent la même saveur de miel âpre et la bonne amertume de quelques Attiques. Les plus sagaces opinions s'y énoncent touchant l'alexandrin et la rime, trop méprisés peut-être par certains des nouveaux venus, et c'est un charme sans égal que les commentaires sur les inutiles spectacles contemporains. Puis, en de brusques sursauts, des chants éclatent en cette prose, ainsi des soleils d'aurore, par exemple quand survient Hamlet, «
le seigneur latent qui ne peut devenir... l'adolescent évanoui de chacun de nous aux commencements de la vie et qui hantera les esprits hauts et pensifs par le deuil qu'il se plaît à porter. »
Ces gloses écrites, un scrupule me reste. Je crains, à la minute de signer, de n'avoir point dit assez hautement notre fervente admiration pour l'œuvre de Stéphane Mallarmé : il importe de la proclamer souvent, dût s'en offusquer la mauvaise foi têtue de la critique, qui justifiera, je pense, une fois de plus, par son silence ou son rire inepte le vers de Jules Laforgue :
Les dieux s'en vont ; plus que des hures !