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Car, moi, je suis gaie, gaie!
Marions-nous encore.
Et je sens que jamais je ne m'habituerai à la tristesse.
C'est qu'alors tu mourras jeune, bientôt.
Tu ne m'as pas dit tes idées en politique. Tu-ne votes même pas. Es-tu inscrit? je parierais que non.
Et pourtant, un gouvernement « c'est de l'air qu'on respire! » Conseille-moi.
Je n'y entends rien, mais quand mes amies me demandent : « Ton mari est-il républicain? » je suis confuse et je réponds tantôt oui, tantôt non, au hasard. Déroutées, elles finissent par ne plus savoir à quoi s'en tenir. Je t'aimerai bien : choisis un parti, celui que tu voudras, pour nous fixer.
J'entre volontiers dans une église, me rafraîchir. Mais, je l'avoue, je ne prierais, à mon aise, sans choisir mes mots, que devant la belle nature.
Et sur une hauteur, afin d'élever plus vite ton cœur dirigeable vers Dieu polyglotte.
Tu vois, tu te moques quand je fais la bête, et tu te moques quand je comprends tout. Suis-je pas la femme d'un libre-penseur?
Nous irons tous deux à la messe demain.