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traits étaient gros et toujours un peu luisants. Il parlait
fortement, même aux dames, et les plis de son cou ondulaient sur son col fripé d'une manière lente et rythmique. Il était encore remarquable pour la rondeur de
ses yeux et l'épaisseur de ses moustaches.
Véringue se tenait debout devant lui, sa casquette
entre les jambes afin de garder toute sa liberté d'action.
D'une voix terrible, le Directeur demanda :
— Qu'est-ce que c'est ?
— Monsieur, c'est le maître d'étude qui m'envoie
vous dire que j'ai les mains sales, mais c'est pas vrai !
Et de nouveau, consciencieusement, Véringue montra
ses mains en les retournant : d'abord le dos, ensuite la
paume. Il fit même la preuve : d'abord la paume, ensuite
le dos.
— Ah, c'est pas vrai, dit le Directeur, quatre jours de
séquestre, mon petit !
— Monsieur, dit Véringue, le maître d'étude, il m'en
veut !
— Ah ! il t'en veut, huit jours, mon petit !
Véringue connaissait son homme. Une telle douceur
ne le surprit point. Il était bien décidé à tout affronter. Il prit une pose raide, serra ses jambes et s'enhardit au
mépris d'une gifle. Car c'était chez Monsieur le Directeur une innocente manie d'abattre, de temps en temps,
un élève récalcitrant du revers de la main : vlan ! L'habileté pour l'élève visé consistait à prévoir le coup et à se
baisser, et le Directeur se déséquilibrait au rire étouffé de
tous. Mais il ne recommençait pas, sa dignité l'empêchant d'user de ruse à son tour. Il devait arriver droit et
du premier coup sur la joue choisie, où alors ne se mêler de rien.
— Monsieur, dit Véringue réellement audacieux et
fier, le maître d'étude et Marseau, ils font des choses !
Aussitôt les yeux du Directeur se troublèrent comme si
deux moucherons s'y fussent précipités soudain. Il appuya ses deux poings fermés au bord de la table, se leva
à demi, la tête en avant, comme s'il allait cogner Véringue en pleine poitrine, et demanda par sons gutturaux :
— Quelles choses ?
Véringue sembla pris an dépourvu. Il attendait (peut-être, après tout, que ce n'était que différé) l'envoi d'un
tome massif de monsieur Henri Martin, par exemple,
lancé d'une main adroite, et voilà qu'on lui demandait
des détails, et des détails précis, naturellement. Pourquoi
pas des gravures ? Comme il apprenait l'anglais, il se dit