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dent avec trop de hâte, et le morceau roulait encore dans sa bouche, lui brûlait la langue et la gorge. Elle croyait manger de la flamme. Soudain, ses bras tombaient. Elle fermait les yeux, et, affaissée, entrouvrait les lèvres. Des choses blanches, des mixtures de salive et de pommes de terre pendaient aux coins. La respiration gênée par le trop plein de l'estomac, elle étouffait.
 — Elle va pourtant se faire péter, disait le vieux qui ne se dérangeait pas.
 — Ça ne peut point tarder, disait la vieille comme en sortant d'un rêve, mais, mon pauvre vieux, ce n'est pas encore pour cette fois.
 Et, soulagée de son oppression, elle buvait un grand coup d'air et replongeait sa main dans la marmite. « Je me suis peut-être volé », pensait le vieux. Tandis que sa femme n'avait guère qu'à regarder pousser ses pommes de terre, les mains jointes sur sa graisse, il devait peiner dans sa vigne, la piocher en forçat, craindre pour elle les gelées et les grêles; être agité d'angoisses quand le soleil se couchait « avec son chapeau », ce qui est un signe de mauvaise récolte. Dès le matin, et jusqu'à la nuit, il se traînait entre les ceps, le dos voûté sous sa peau de chèvre rousse, épouvantement des merles. Il vendangeait seul et bousculait la vieille, en trépignant de fureur si, dans l'espoir de goûter au vin doux, elle lui faisait hypocritement ses offres de service. Il foulait son vin lui-même avec-ses pieds, ses pieds à lui, poudreux, crottés même si c'était son idée, et, les poings fermes au bord du tonneau, il faisait travailler activement ses vieilles jambes ligneuses, passionné, ardent comme à une tuerie, éclaboussé de taches sanglantes. La vieille rôdait autour de lui, essayait ses flatteries.
 — Je crois qu'il va être bon, cette année !
 — Oui-da ! tu le crois, carne! disait le vieux, redressé, et se croisant les bras dans la vapeur d'or de la cuve, comme un lutteur en pleine victoire.
 — C'est mon avis ! ajoutait la vieille, encouragée, artificieuse.
 — Elle dit que c'est son avis ! criait le vieux, les mains levées vers les nues, près de fondre à pieds joints sur la vieille et de s'abattre sur elle, toutes griffes dehors.
 Mais, apparemment, la peur qu'un moment d'arrêt ne fit tourner son vin le calmait, et il se remettait à piétiner, à broyer le raisin comme un ennemi personnel, les talons en feu, usant sa dernière vigueur, farouche et, par l'odorat, déjà ivre.

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