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DEUX EMPEREURS


 Dans un célèbre parallèle, Voltaire avait déjà mis en présence deux princes, l'un de race germanique, l'autre de sang slave. Il faisait là œuvre de dilettante :les deux princes dont il se plaisait à conter l'histoire n'avaient qu'à titre de curiosité intéressé la France ; elle avait, en spectatrice amusée, assisté à leur conflit, indifférente à ce que la victoire restât dans un camp plutôt que dans l'autre. Il n'en est pas de même aujourd'hui, et si les princes, dont elle est obligée de suivre d'un œil anxieux les réciproques politiques, sont peu propres par leur personne à exciter le même enthousiasme que leurs illustres et géniaux devanciers, leurs entrevues, leurs décisions, leurs manifestations, leurs intentions respectives sont pour elle d'une bien antre importance.
 De Charles XII, Guillaume II a tout, sauf cette indépendance d'aventurier qui permit au Suédois, sans trop de responsabilité, de risquer follement sa peau et sa couronne sur tous les champs de bataille de l'Europe. De Pierre-le-Grand, Alexandre III n'a rien, sauf l'imperturbable patience et la foi sereine en la grandeur de son peuple.
 L'Allemand est jeune, intrépide, fougueux ; son tempérament le pousse à oser ; il procède par coups de tête, tantôt généreux, tantôt ridicules, toujours imprudents ; sa vertu, c'est la belle illusion de ses pensées ; son vice, l'intempérance fâcheuse de ses actes ; il vibre, il carillonne, il subjugue ; tout fermentant de vie, il entend communiquer son ébullition à son entourage, à son empire, à ses voisins, au monde ; sa confiance le pousse, son optimisme le guide, son bonheur — jusqu'à présent — a fait le reste. Cet Allemand est un Français ; plus qu'un Français : un méridional.
 Le Russe est lent, compassé, recueilli ; il ne se presse de rien, il attend, il repose dans une immobilité de sage vieillard, il n'agit qu'en permettant très difficilement an cours fatal des choses de suivre plus loin ; il ne décide jamais, il se résoud ; sa volonté, c'est le statu quo ; son mot d'ordre, le silence ; bien loin de tenter l'inconnu, il ne transige qu'avec l'inévitable ; il fractionne, imposant à la porte des traditions ; son esprit contemple, son cœur s'absente, son imagination dort. Ce Russe est un Turc ; plus qu'un Turc : un marabout.
 Chacun d'eux — c'est bien connu — est un mystère : mais l'un est un mystère dispersé à tous les vents ; l'autre un mystère rebelle à tous les rayonnements. D'ailleurs, il n'y a peut-être pas grand secret derrière leur tête ! Mais leur position est si considérable, que l'on s'imagine volontiers que chacun de leurs froncements de sourcils recèle un million de pensées. On ne prête qu'aux riches : combien prête-t-on davantage aux puissants !
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