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 Il suffit que ces deux hommes soient à l'heure qu'il est les arbitres presque absolus des précieuses destinées de notre lamentable Europe : on ne saurait braquer sur eux trop de télescopes — ou de microscopes. Ces deux géants — ou ces deux gnomes — sont capables à eux seuls d'ouvrir ou de fermer les portes du temple de Janus. Leurs proportions ne font rien à l'affaire ; un simple bacille déchaîne dans un homme le choléra ; un petit vibrion nerveux produit dans ce même homme la santé et le bonheur. Alexandre et Guillaume sont dans l'organisme continental ces éléments terribles qui, quelque infinitésimaux qu'ils soient, dispensent à tout le reste ou la vie ou la mort. Seront-ils meurtriers ou féconds ?
 C'est en de si peu réjouissantes pensées que j'étais, l'autre soir, absorbée — autant, du moins, qu'une femme peut se laisser absorber par des pensées. Le jardin supérieur du palais de Peterhof était, depuis le matin, envahi par une foule qui attendait les deux empereurs. Ceux-ci n'arrivaient pas. La foule se dispersa. Prévenue de l'heure probable de l'arrivée, je rôdais à peu près seule dans le parc alors presque désert. Une trentaine de personnes, qui avaient eu vent comme moi du moment auguste, on qui s'étaient obstinées, lancinées du désir violent de contempler durant deux minutes deux impériales figures, fermaient un petit groupe devant l'entrée des appartements réservés au César étranger. Un magnifique suisse, enseveli dans un fastueux manteau rouge chamarré d'aigles jaunes, bondait de sa corpulence la baie de la porte. Deux grands diables d'Allemands, casqués congrûment et culottés de blanc, se tenaient plantés immobiles au bas de l'escalier. Des domestiques de la cour s'affairaient.
 J'étais fort exaspérée d'une attente d'une demi-heure déjà, lorsque le prince Ivan Egorovitch m'accosta et m'offrit son bras.
 Il faut que je présente le prince Ivan Egorovitch. Je ne dirai rien de son physique : ce physique n'intéresse que moi. Mais son état d'esprit est bien digne de remarque, surtout pour un étranger observateur : Ivan Egorovitch est un résumé, un compendium exact de ce que pensent, de ce que croient, de ce que jugent, de ce que veulent, de ce que rêvent plusieurs millions de ses compatriotes. Ivan Egorovitch est russe jusqu'au bout des ongles, mais un Russe mauvais, pédant, intransigeant, un Russe pour qui tout ce qui n'est pas russe est un objet de haine et de mépris, un fanatique de la Sainte Russie — il tient à l'épithète — un panslaviste, non pas seulement dans le sens que tous les Slaves doivent être Russes, mais aussi dans celui que tout ce qui est russe est bien et que tout ce qui est bien est russe. Le voilà défini.
 — Eh bien, princesse, commença-t-il, nous allons donc voir ce jeune héros, ce favori de la gloire... à venir, ce chevalier errant redresseur de torts et pourfendeur de vieilles gibernes !
 Je sentis de suite dans ces paroles et dans le ton sur lequel elles étaient prononcées un trait narquois et perfide décoché

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