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décochés vers le ciel, jusqu'aux trompes bossues, coulant contre terre, en passant par les nez gonflés, les nez caverneux, les nez en navet, les nez en tire-bouchon, les nez dominateurs, accaparant toute la physionomie, plus vastes par leur monstruosité de solitaire, les nez aplatis, épatés, avec des apparences de mollusque accroché, les nez avortons, perdus dans une vallée de la face, les nez filandreux, les nez cucurbitacés et les becs de perroquet. On pouvait trouver, en cherchant, un détail agréable : une lèvre délicatement tournée et rose, un iris velouté, doux, expressif, des dents régulières, réalisant d'assez près l'image commune de la rangée de perles, un cou moins banal que les autres et s'élevant avec quelque noblesse hors des épaules. Mais où prendre le visage parfait, c'est-à-dire l'ensemble de détails excellents concourant à un tout admirable ? Ce n'était pas, à moins d'une chance extraordinaire, sur la quantité limitée des invitées qu'on osait espérer le découvrir : il fallait mettre sens dessus dessous Paris, passer en revue son million de femmes, et s'estimer heureux si le nombre des élues de race divine se montait à une demi-douzaine. Inutile, du reste, et peu désirable la rencontre d'un de ces chefs d'œuvre : pour n'éprouver devant lui qu'une froide approbation, le raisonnable enchantement qui s'empare du spectateur devant la Vénus de Milo, et séduit son instinct artistique sans captiver son cœur ! Toujours, et comme par une loi fatale, quelque vice énorme souillait, en l'annihilant, l'impression favorable causée parfois par l'un de ces détails. L'on devait presque regretter l'apparition et le flamboiement d'une suave prunelle brune sous une arcade sourcilière chauve ou golfe, un sourire radieux surmonté d'une protubérance nasale digne d'un tapir. C'est en vain que S*** observa : au milieu des salles de fête, entre les palmiers du jardin d'hiver, dans les sophas des petits salons, tourbillonnantes ou s'élongeant en poses étudiées, tandis que dans l'atmosphère lourde flottaient les enroulements mélodiques des valses, les créatures angéliques, vraie collection simiesque, passaient et repassaient devant ses yeux las, sans exciter en lui autre chose qu'un amer sentiment de dédain.
 Ce bal était ce que sont tous les bals, toutes les réceptions mondaines, toutes les soirées d'Opéra, toutes les réunions où le sexe accourt pour se montrer et pour exercer son empire : la beauté de la femme s'étalait dans toute sa laideur.


Louis Dumur.

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