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Invoque des bras et des pleurs le Christ de plâtre
Qui s'arrache du mur et, lumineux, descend.
Elle oint des yeux l'Époux que son cœur idolâtre,
Mais Lui montre d'un doigt hautain son flanc puissant
Dont, rouverte douleur, la lèvre violâtre
Semble taire un reproche en sa bave de sang!
Mon Dieu! que ce doigt qui me blâme
M'absolve du crime évité!
A voir saigner votre côté
Je me sens et vois saigner l'âme!
Fidèle Époux que mes Vœux ont élu,
Tissez de feu ma haire de salut!
Mon Dieu! que l'ombre haïssable
De traits admirés trop souvent
Parte de mes yeux comme au vent
D'oubli, l'aveuglement du sable!
Royal Époux des neuf Règnes ailés,
De pleurs lavez ma vue et la voilez!
Mon Dieu! brisez l'urne fragile,
L'urne fangeuse qu'est mon sein,
Ou tirez un vase aussi saint
Qu'un ciboire de cet argile!
Suave Époux du cœur qui meurt béni,
Parlez en moi, tel qu'un chant dans un nid !
Mon Dieu! que, jaloux des charnelles
Fautes qui hantent mon tourment,
Veille votre regard clément
Au seuil pécheur de mes prunelles!
Céleste Époux mystiquement viril,
Murez d'amour votre esclave en péril!
D'Elle s'est retiré le Christ inexauceur
Dont la forme affinant sa stature éclatante
Renaît sous les contours prosternés d'une sœur,
Et ce spectre dolent de belle pénitente
La baigne d'un regard, où, mourante douceur,
Pleure un ciel incompris et mauvais qui la tente;
Mais dessous sa chair faible au charme ravisseur,