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commence à s'en effarer. Et puis, je vous avouerai franchement que, loin d'avoir une prédilection pour cette « argenterie nationale », comme vous l'appelez, je la trouve le plus souvent d'un travail rudimentaire et peu distingué. C'est lourd, c'est riche, c'est cossu, si vous voulez, et cela ne coûte pas cher, ce qui est un avantage vraiment, mais ce n'est pas artistique. Pour laisser de côté les cuillers, toujours les mêmes avec leurs éternels dessins de lignes droites coupées à angles aigus, cela se borne à quelques représentations naïves d'une nature vulgaire, où la troïka, l'izba et une douzaine d'objets d'un usage commun sont exclusivement mis à contribution. Je suis lasse de ces timbales à thé et de ces boites à cigarettes où galopent perpétuellement trois chevaux emportant un moujik qui tire sur les rênes. Et lorsque l'argent est émaillé, c'est bien pis : ce n'est plus alors qu'un fouillis de chatoiements colorés, auquel on cherche vainement une intention même d'art; et l'estime qu'on en a rappelle la passion des nègres pour la verroterie.
 De fil en aiguille et des cuillers aux plus hautes manifestations de l'art chez les peuples, la dispute s'envenima. On passa en revue l'architecture, la musique, les lettres, le théâtre, Ivan Egorovitch se cramponnant, ne lâchant pas d'un cran son enthousiasme aveugle et entêté pour son incomparable patrie, prétendant me faire violence et me prouver que la Russie, loin d'être inférieure en art à quelque autre nation que ce soit, les dominait toutes de son antique splendeur, de sa vitalité présente et de son avenir infiniment fécond. Il est certain que ses raisons n'étaient que d'orgueilleuses et absurdes affirmations, et qu'au seul toucher des faits ses prétentions s'affalaient dans la plus grotesque des fondrières. N'importe, il n'en démordait pas. Pour ne pas l'irriter jusqu'au paroxysme, je ne lui dis pas les trois quarts des choses que j'avais sur la langue. Ce que je me permis d'exprimer suffit pourtant à le mettre hors de lui : car après deux heures de cris, à bout de forces, il partit furibond.
 J'étais navrée.

 Qu'y faire? Plus j'y pense, de la meilleure volonté du monde, plus je me convaincs, avec une vraie tristesse, que chez les Russes le sens esthétique n'existe pas.
 Je fais à l'instant la réserve des Russes qui ont reçu la culture européenne et qui, plus ou moins, se sont poli l'épiderme au contact d'une civilisation. Il y aurait pourtant beaucoup à dire sur leur compte.
 Mais entrez dans une maison peu suspecte d'occidentalisme. Vous êtes surpris du mauvais goût qui s'y étale. Je dois même dire qu'il ne s'y trouve pas de goût du tout, afin de pouvoir disposer du terme « mauvais goût » pour les gens qui l'ont différent du mien. C'est un logement inélégant, informe, vulgaire, vaste comme une caserne ou réduit comme un placard, suivant l'état de fortune de celui qui l'habite, bien pourvu de poêles énormes, épaissement muré, et où les précautions contre le froid sont minutieusement prises. Les meubles sont

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