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Comme parmi l'air chargé d'encens — Filtrait un crépuscule d'hiver, doux et dense, — Le peuple se leva, achevée sa dernière prière, — Mais, écoutez! voici l'hymne des enfants.
Autour du grand pilier, là-bas, en cercle, — Les chanteurs sont debout deux à deux, — Petites filles aux cheveux de filasse dont les jeunes yeux — Ont des regards couleur de la mer grise.
Maintenant, vers le ciel, la pure musique monte — En une douce cadence et des résonances argentines.
— Les flûtes et les subtils violons — Ont des harmonies moins délicates.
C'est un chant au timbre plaintif — Et des rimes et des refrains anciens et bizarres : — « O Monseigneur saint Jacques ! » —Voilà ce que l'on chante, et : —« O saint François d'Assise ! >
Dans la croissante obscurité, on peut voir — Les petites têtes en bonnet blanc qui scandent — En mesure les vers rythmiques — Stellés de noms d'amour.
Elevés sans nul luxe de soie, — Nourris en nul espoir de splendeurs futures, — Ce ne sont que des enfants de paysans, — De très modeste fortune.
Pourtant, n'est-il pas vrai? Ce soir-là, peut-être — Que des yeux plus détachés du monde auraient clairement vu, — Parmi ces petits bonnets brillant dans l'ombre, — Le scintillement d'une auréole.
Ce soir-là, je compris que les Portes de Perles — Sont mieux qu'aux autres ouvertes aux pauvres qui suivirent — Le sentier de la tendre jeune paysanne,
— Celle qui porta le Fils de Dieu.