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dans le vide du désert, au berceau du nouveau-né, et au cercueil qu'on enfouit sous la terre, quand les heureux rient et quand pleurent les malheureux, - je vois ces yeux partout et toujours.
 Dans la femme que je voudrais pouvoir aimer et dans mon meilleur ami, dans le bourreau et dans la victime, dans le grand et dans le petit, - sous la toque de soie et sous le large chapeau de feutre - je vois ces yeux, toujours ces mêmes yeux.
 Ils tournoient autour de moi la nuit et le jour; le matin quand je m'éveille ils se tiennent près de mon lit, et le soir lorsque j'ai fermé les miens ils me regardent à travers l'obscurité. Et ce ne sont pas deux yeux seulement comme dans une face humaine ; par myriades ils jaillissent d'un inépuisable écrin, innombrables yeux d'un fantastique polype géant étreignant la terre tout entière de ses bras. Ils me poursuivent comme le sort, ils se sont enfoncés dans mon âme comme des dents en de la chair. Même si je me détourne, je les vois, je les aspire avec l'air, je les inhale avec les rayons du soleil, je les reçois avec les paroles des hommes et les pensées des livres...
 Avec le regard tout à la fois d'un chien maltraité, et d'un ennemi traître - comme un poignard dégainé caché sous le manteau, et des pas assourdis dans l'ombre, comme des pensées qui jamais n'ont trouvé de paroles, qui toujours sont restées un murmure rauque, - douloureux et astucieux, menaçants et haineux, ils plongent dans mes yeux, yeux de malades, de faibles, d'infirmes, yeux d'esclaves voyant surgir le manteau azuré du Seigneur à l'horizon d'or de l'Avenir.


VIII
.


 Une nuit d'été, par la pleine lune, j'allai dans la forêt. Parmi les aulnes de la clairière, j'aperçus le Dieu du Temps se reposant sous les rayons de la lune.
 — Que cherches-tu dans la forêt, à cette heure

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