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Il est capable d'une grandiloquence toute castillane :
Moy qui bride les vens, qui charme les esclairs,
Qui donne la lueur aux espaces des airs,
Qui commande aux frimats, enchante les tonnerres,
Et cognois la vertu des herbes et des pierres ;
Qui fais palir chacun de craintes et d'effrois,
Moy qui suis le mignon des seigneurs et des rois,
Moi, continue-t-il (indigné des prétentions de telle vieille fille sur sa personne), j'irais épouser cette « infâme Méduse » ? Description truculente et bouffonne des hideurs de la pauvre amoureuse :
Tout ainsi que l'on voit dessus le pont au Change
La montre de l'orfevre, ou tantost un coral
Rougir contre vos yeux, et tantost un cristal
Donner de son brillant dedans votre prunelle,
Icy du diamant petille l'etincelle,
Icy reluit l'opale, et du saphir le pris,
Deça un hyacinthe, un agate, un rubis,
De là la calamite (10), icy les perles fines,
Deça un beau carcan (11) de riches cornalines ;
Ainsi, sur l'abregé d'un si rare menton
Vous y voyez tantost dorloter (12) un bouton,
Quelque goutelle icy de verole le signe,
Deça quelque malandre (13) et de là quelque tigne (14)…
Donc,
Retranche toy, Gorgone, au ténébreux manoir,
Et n'espère soulas en l'amour qui te ronge ;
Si les Incubes vains ne te causent un songe
Qui te fera penser que j'amortis tes feux…
Ironie que reprendra François Maynard, en un propos analogue, congédiant une vieille :
Et si l'on ne baise aux Enfers
N'esperez plus d'être baisée.