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On s'aperçoit du mal à son actualité et du bien à sa virtualité.
Nous pensons au bien sans le faire ; nous faisons le mal sans y penser.
Faire le bien n'est pas tout : il faut le bien faire.
L'abîme qui sépare le bien et le mal est aisément comblé par l'intérêt.
Il n'y a aucun mérite à faire le bien, lorsqu'on n'a pas d'intérêt à faire le mal.
On se repent d'une mauvaise action, lorsqu'elle a été inutile.
Nous faisons le bien avec un grand plaisir, lorsqu'il est dans notre intérêt de le faire.
Le bien que l'on fait par intérêt est-il moins du bien que l'autre ?
Ce qui prouve que l'homme est bon, c'est qu'il lui arrive de faire le bien sans que son intérêt l'y pousse : jamais le mal.
Il y a trois manières de faire le bien : avec intérêt, sans intérêt, contre l'intérêt. La première seule rend parfaitement heureux.
Plus on fait le bien d'une façon désintéressée, plus on est sensible à l'ingratitude.