Page:Mercure de France tome 005 1892 page 171.jpg
et il faut le réduire à l'instinct pour que l'affirmation de M. de Gramont trouve son application exacte. Mais, dans la pièce, il ne s'agit point de ce que Gourmont a si joliment appelé le « jeu des sensations élémentaires » ; l'union des de Stampes — quel mari! — n'a du reste pas eu de prolégomènes ; l'expérience a commencé quand le rideau se lève, et la proposition physiologique de l'auteur est alors de certitude absolue : lorsque l' « unisson n'existe pas dans les vibrations conjugales, il y a déception, malaise, drame ». Or, c'est l'homme, instruit d'avance, qui devra rechercher si sa femme est capable — puisqu'il est patent que d'aucunes ne le sont point — de « vibration », puis le degré possible de vibration de son tempérament, quitte à la femme, une fois son intelligence ouverte au problème, à tendre vers la concordance. Et il y a... incompatibilité d'humeur — non reconnue, hélas, par la loi — si les facultés vibratoires des conjoints sont par trop inégales, ou si, ce qui est la même chose, le mari s'en tient par un préjugé assez sot et malgré leur inefficacité aux rapports « classiques », alors que la situation commanderait ― car le but est sacré — d'autres moyens. C'est ce que le Dr Dugast, un ami de la famille de Stampes, essaie de faire entendre à Pierre, qui n'a su donner à Simone qu'une déplorable idée du mariage. Non pas qu'il s'abstienne, au sens vulgaire d'être son mari ; mais il a sur la dignité des relations conjugales, même les plus intimes, de solides principes : on ne doit point traiter sa femme en maîtresse. Il se fâche presque aux insinuations du docteur, qui se garde bien d'y revenir. Mais voilà qu'une amie de Simone, Rose, retour de son voyage de noces, lui raconte sur la vie conjugale des choses extraordinaires ; — et peu de temps après le mari de Rose, le compositeur de Mauryas, révèle à Simone, pendant un voyage de Pierre, les délices soupçonnées. Le reste de la pièce ne sert qu'à terminer l'action : nouvelle du retour de Pierre, sur une pressante lettre de parente trop zélée qui veut sauver Simone ; refus par Lucien de s'enfuir avec sa maîtresse. Puis, comme le mari a résolu enfin de suivre les conseils du docteur, Simone, accablée déjà par ce qu'elle juge une lâcheté de son amant, ne supporte point l'idée d'être à Pierre, et elle s'empoisonne.
M. de Gramont a mené cette situation périlleuse avec beaucoup de talent et de tact ; il s'est souvenu,