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Paris, ce 8 mai 1892.
Mon cher ami,
J’ai dans mes cartons, terminé depuis quelques temps déjà un petit travail qui s’appellera, si vous le voulez bien, La merveilleuse Doxologie du lapidaire. Je m’y suis essayé à dégager des pierres précieuses, de leurs vertus légendaires, de leurs couleurs, etc., un certain symbolisme qui m'est, je crois, à peu près personnel. Il n'y a donc, sans aucun doute, rien de commun entre cela et le chapitre: Marbode et la symbolique des pierres précieuses du Latin mystique, de Remy de Gourmont. Toutefois, pour prendre date - le Figaro vient-il pas, dans son supplément du 7 mai, de publier un article sur ces somptueux joujoux ?- je vous saurai gré de publier cette lettre et d’annoncer comme à paraître (???) la Doxologie en question.
Amitiés à Gourmont et à vous,
Louis Denise.
Mon cher Vallette,
Ce mois je comptais analyser la Vie du Poète, symphonie-drame de Gustave Charpentier, le Gluck des Magnifiques.
Par malheur, lors de sa lumineuse audition au Conservatoire, j’étais en train, Jonas en pantalon rouge, d’être digéré par une de ces baleines de pierre parquées à travers la Patrie, que clairement l’on nomme des casernes.
Certes, j’eusse désiré parler d’abord de l’idée en musique- « le violon est crâne et l’archet un scalpel, musiciens, contez-nous le cerveau. » - puis de l’orientation de cet art vers une sculpturalité singulière, mais Déroulede ne l’a pas voulu.
L’occasion m’était pourtant heureuse, envisageant la musique aux points de vue abstrait et concret, à traiter de son avenir idéoréaliste, car, ne cessons de le constater, l’équilibre où se dirigent tous les arts jusqu’ici boiteux, c’est l’idéoréalisme, je veux dire le magnificisme.
En peinture, tenez, cet avénement est-il pas saisissablement préparé par l’impressionnisme (réalistes) et par le mysticisme (idéalistes) ? La peinture magnifique combinera, les parfaisant, la vertu de ceux-ci avec l’effort de ceux-là ; dès lors nous tomberons à genoux devant une vierge sortie des hommes par sa beauté descend de Dieu. Cet espéré peintre nous permettra d’habiter ses toiles ou bien d’en détacher les reliefs héroiques pour nous refaire une nature, une famille. Et nous serons enfin sauvés de la lèpre accrochés aux murailles !...
En attendant le jour où je pourrai développer ces points, que Charpentier et que ceux qui me lisent trouvent ici mes excuses !
Cordialement,
Saint-Pol-Roux.
Il nous revient parfois qu’après avoir été brutalement arrêtés, conduits à Mazas et gardés au secret préventivement pendant