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Les vieux mirages d'or ont dissipé son deuil;
Et dans les visions, où son ennui s'échappe,
Soudain - gloire ou soleil — un rayon qui la frappe
Allume en elle tous les rubis de l'orgueil !
Mais d'un sourire triste elle apaise ces fièvres ;
Et, redoutant la foule aux tumultes de fer,
Elle écoute la vie — au loin - comme la mer....
Et le secret se fait plus profond sur ses lèvres.
Rien n'émeut d'un frisson l'eau pâle de ses yeux,
Où s'est assis l'Esprit voilé des villes mortes;
Et par les salles, où sans bruit tournent les portes,
Elle va s'enchantant de mots mystérieux.
L'eau vaine des jets d'eau, là-bas, tombe en cascade;
Et pâle à la croisée, une tulipe aux doigts,
Elle est là, reflétée aux miroirs d'autrefois,
Ainsi qu'une galère oubliée en la rade...
Mon âme est une infante en robé de parade.
Albert Samain.