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subtile. Grégoire XIII, en 1584, affilia à Rome
toutes ces congrégations, et Benoist XIV dans la
bulle d'or Gloriosae Dominae de 1748 en fit le plus
vif éloge. C'est à cette assistance de bonne
volonté, formée de gens relativement instruits,
que le Père Lang offrit, en vingt-deux samedis
soirs, le spectacle de la Passion. Il aurait pu,
comme d'autres Pères, s'illustrer par des tragédies
profanes, des Lysimachus et des Brutus, ou même
composer des ballets et les danser au besoin (3). Il
aima mieux reprendre, sans s'en douter, je le
crains, la tradition commencée plus de quinze
cents ans auparavant par le Christos paschôn.
Grâces lui en soient rendues!
Les membres de la congrégation se réunissaient
le samedi soir dans leur oratoire. Là, ainsi que
l'on fait maintenant pour les matinées, des rideau interceptaient la lumière naturelle et des
flambeaux et des lampes éclairaient seuls le
théâtre dressé dans le fond. Après une courte
prière intérieure, la toile se levait et des personnages figurés sur des transparents (« per chartas
transparentes! »), ou en bois peint et sculpté, représentaient le Mystère sur lequel, ce soir-là, portait
la méditation. Après une « exposition » des principaux motifs édifiants suggérés par la scène Evangélique, venait une « considération » silencieuse
d'à peu près un quart d'heure; puis on chantait
quelques strophes accompagnées de musique qui
exprimaient les « affections » de l'âme, émue
par un tel concours de la poésie, de l'éloquence et
de l'art théâtral. Ensuite le directeur passait à un
second, puis à un troisième point, avec ou sans
changement de décor, et l'exercice, pour cette fois,
était terminé. Ainsi que tout dramaturge un peu
sérieux, le Père Lang s'inquiète beaucoup des
conditions matérielles du spectacle, il essaie d'expliquer de son mieux comment manœuvraient.