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seraient ce soir murés dans leurs beuglants, sous un mortier de chaux vive. — Mais M. Willy, qui est conscient, qui certes ne s'illusionne guère sur la valeur des idioties présentes, que nous veut-il avec sa préface en boniment de foire? Quoi! la chanson ? — Quoi! la chanson littéraire? — Nous devons nous esclaffer devant ces niaiseries, ces pétarades, ces coq-à-l'âne; devant une Marche des Calicots, une Complainte des Académiciens:
C'est Victor Duruy;
Qui porte des bas de lain'?
M. Willy, avouez-le; pour faire plaisir à des copains, vous nous en jouez une bien bonne.
C. Mki.
L'Esclandre, par Nada (Savine). — L'auteur, à en juger par la gravure qui sert de frontispice à l'ouvrage, nous a paru d'une beauté rêveuse, un peu mièvre, digne de tous les éloges. Nous avons le regret de ne pas pouvoir en dire autant de son œuvre.
G.D.
(I) Aux prochaines livraisons : Les Aubes mortes (Jho Pâle);
Empedocle (Mario Rapisardi) ; Raggi e Ombre (Alfio Belluso) ; Le Policier (Oscar Méténier) ; Paraiso perdido (A. de Oltveira-Soares) ; La Voie Sacrée (Jules Méry) ; Comic Salon (Willy) ; L'Athènes de la Sprée (Luc Gersal) ; Les Illuminés (Jac Ahrenherg et Fernande de Lysle) ; Coups de Plume (Firmin Vanden Bosch) ; Anarchistes (John-Henry Mackay, trad. de Louis de Hessem) ; Les Sphynx (Jean La Fargue); Pour l'Amour des Vers (Cornelius Price); Dans la Fournaise (Théodore de Banville); Tiradentes (Montenegro Cordeiro) ; L'Amoureuse Chanson (Jean de Brion); De Jérusalem à Constantinople (Lucien Trotignon) ; Poésies ; Contes de Fées (Mme Gurman); Contrastes et Charbons verts (Dimokidès).
(2) On lit en effet dans le XIXe Siècle du Ier juin : — « Je voudrais pouvoir dire du bien de ce roman et je serais tout disposé à le faire si je l'avais compris... C'est le cas de dire que la sauce fait passer l'anguille. Les descriptions de la ville de Bruges sont peut-être fort poétiques mais elles sont si confuses que l'on pourrait prendre en y allant le Pirée pour un homme et les béguinages pour des maisons de tolérance. » — Sous la signature de M. Théodore Cahu ; — et sans commentaire.
La National Review de juin contient une intéressante étude d'Arthur Symons sur Paul Verlaine; en voici la conclusion :
« ..... Ce que Verlaine a fait de sa vie, cela nous intéresse seulement en tant que sa vie a créé ou modifié l’œuvre de l'artiste; et en lui vie et art ne font qu'un, aussi sûrement qu'ils ne font qu'un en Villon. Depuis les Romances sans paroles jusqu'aux Liturgies intimes, chaque période de cette « fièvre appelée la vie », il l'a chroniquée et caractérisée en vers. Le vers a changé comme la vie a changé, demeurant fidèle à certaines caractéristiques fondamentales, comme l'homme, à travers tout, est demeuré fidèle à son étrange et contradictoire tempérament. Verlaine a fait quelque chose de neuf du vers français, — quelque chose de plus pliable, de plus exquisément délicat et sensitif ; la langue, avant lui, avait quelques qualités de moins. Il a inventé cette nouvelle sorte de poésie impressionniste, « la nuance, la nuance encore », qui semble correspondre si subtilement aux dernières tendances des autres arts : la peinture de Whistler, la musique de Wagner. Lui-même, créature de passions et de sensations, ballottée çà et là par tous les vents, il a donné une voix à tous les vagues désirs,à toutes les tumultueuses impressions de cette faible et frénétique créature, le moderne homme des villes. Il a mis cela en une musique