Page:Mercure de France tome 005 1892 page 345.jpg
« A mon ami Gustave Geffroy »: — cette simple dédicace inscrite au seuil de l'Art Impressionniste marque la place de Georges Lecomte dans la famille des écrivains d'art.
Tout jeune — 24 ans à peine — Georges Lecomte à déjà affirmé son tempérament personnel, très net, dans des productions très diverses.
Auteur dramatique, il a donné La Meule, cette pièce d'une haute portée sociale, dominée par une philosophie douloureuse et apitoyée, toute frissonnante d'émotion bien humaine, si éloquente en son agencement logique, qui obtint un vif succès, malgré quelques excessivités de mise en scène, imprévues par l'auteur et nullement nécessaires, du reste, à la signification de la pièce ; cette année, il dota le Théâtre Libre de Mirages, drame en cinq actes dont la hauteur de pensée et l'intensité scénique produisirent une impression très grande le jour de la lecture, et que M. Antoine s'est vu, à regret, dans la nécessité de reculer de mois en mois, puis enfin de remettre à la saison prochaine, tant cette pièce importante exige de soins, d'études et de forces.
Des nouvelles parues cà et là, d'une vision émue, discrètement ironiques et toujours riches en au-delà, de rythmes très variés, gemmées de beaux vocables et d'images expressives, nous ont plu infiniment.
Les études d'art, tant à La Cravache dont il fut rédacteur en chef qu'à Art et Critique, à L'Art Moderne de Bruxelles, aux Entretiens Politiques et Littéraires, à L'Art dans les Deux-Mondes, où il fit l'année dernière des campagnes appréciées, révélaient un amateur passionné et compétent du Beau, un érudit en matière d'art et un homme de goût. Dès l'année 1887, il se manifestait défenseur de la peinture claire, décorative et caractéristique; ses pages colorées, vibrantes, souplement évocatrices de belles lignes et de tons fastueux, s'adaptaient au tempérament