Page:Mercure de France tome 006 1892 page 342.jpg
Version du 29 décembre 2014 à 12:18
G.-ALBERT AURIER.
PIERROT POÈTE (1)
SCÈNE I
ARLEQ.UIN
ARLEQUIN (seul}. — Drôle d'idée, pourtant, de m'avoir donné rendez-vous dans un cimetière! Faut-il que ces femmes soient romantiques! Un duo d'amour parmi des tombes ! C'est d'un 1830! d'un rococo! d'un Shakespearien ! (// se promèneimpatiemment en roulant une cigarette.)— Tiens! un crâne! Un crâne I... Faut-il que ce cimetière soit mal entretenu ! (// le ramasse.} — Ah! non, c'est une boule à quilles 1... Beau sujet de méditation pour un poète de la vieille école. (//regarde le er.ine en nue pose d'Hamlei] Etre ou ne pas être, telle est la question !Mourir,' dormir !... Dormir, petit-être rêver !... Crâne ! Boule à quilles! Boule à quilles! Crâne !... Kif-kif! comme disent les Arabes !... Mais elle ne vient point. Tiens ! Des pas !... Qui diable peut se promener a pareille heure dans un pareil décor de mélodrame !... Ah ! un fossoyeur...
SCÈNE II
ARLEQUIN, UN FOSSOYEUR
ARLEQUIN. — Bonsoir, l'ami !...
Ln FOSSOYEUR. — Bonsoir, seigneur Arlequin!
ARLEQUIN (à part}. — Donnons-lui le change sur le motif de ma présence ici.(Haut.} Tu vois, l'ami, j'étais venu dans ton cimetière faire des vers, et,ma foi, j'attendais... j'attendais l'inspiration...
LE FOSSOYEUR. — Eh bien, vous n'attendrez pas longtemps.... Elle vient... Dans cinq minutes
(i) Pièce en un acte complètement charpentée, mais non êcrite : Albert Aurier avait l'intention de la mettre en vers, ainsi qu'en témoigne le fragment que nous publions plus loin «n note. — A. V.