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ciété s'organisait, se dégageait davantage de sa signification charnelle. Ce n'était plus la femelle : c'était la femme, c'est-à-dire, des terres, des troupeaux, de l'or, ou tout au moins deux bras pour travailler ; c'était l'alliance, en vue de la lutte pour la vie, de deux familles, de deux clans, de deux, tribus ; c'était, sous, prétexte d'hyménée, la constitution d'un patrimoine et la confection d'héritiers pour en perpétuer la possession. Et, depuis lors, ce ne fut plus le coït, mais le « devoir conjugal. »
Le mariage, mon cher enfant, est une association de deux personnes — en général de sexe différent — intéressées à mettre en commun leurs biens, leurs noms, leurs parentés, leurs efforts, leurs préoccupations, leurs goûts, leurs caractères, leurs aptitudes, leurs expériences, leurs infortunes, tantôt par ambition, tantôt par convenance, tantôt pour tenir état de maison, tantôt par raison d'économie, parfois par ennui d'être seul, souvent pour cause d'extension de commerce. Lorsqu'un homme épouse, il consulte d'abord son livre de caisse, puis la valeur de ses relations, puis la commodité de son intérieur, puis la solennité de sa personne, en dernier lieu la santé de son corps : ordinairement même il néglige ce point-là. Il établit le balancé des divers avantages que son union lui procurera, au prix, de quelles concessions, de quels inconvénients, de quels sacrifices : et le total répond oui ou non, comme sous une addition de doit et avoir. Tel est le mariage : un contrat. Ainsi que dans tout contrat, les deux parties s'engagent à respecter des conventions préalablement débattues : conventions sur la fortune, sur la propriété, sur l'héritage, sur le train de vie, bref sur tout ce qui peut être matière de contrat. Parmi ces conventions, deux sont maintenues obligatoires par