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Dit la Baronne, en son morne manoir :
— « Le vent hulule !... Et le ciel est sans astres !
« Le vent hulule !... Et le ciel est bien noir !...
« C'est une nuit de guerre et de désastres !...
« Le vent hulule, aux créneaux du manoir... »
Dit la Baronne, en son morne manoir.
« Gai Troubadour ! O mon gai Troubadour !
« Racontez donc, à votre douce dame,
« En attendant que fleurisse le jour,
« Racontez donc, ô mon gai Troubadour,
« Une histoire d'amour ! »
Le Troubadour ceci dit à sa dame :
« Pour l'effroi des hameaux de ces terres novales
« Que protéger ne sut le Moine nonchalant,
« Des Ducs velus, juchés sur d'étiques cavales,
« Ont passé, dans la nuit, comme un songe sanglant !...
« Sous les sabots traînant, dans l'ombre, un incendie,
« Et les naseaux fumant ainsi que des Etna,
« Pleuraient les chapelets, entre les mains roidies
« Des Tonsurés, qu'un bras lourd estramaçonna !...
« Ils ont passé, dressant leurs féroces bannières !...
« Et leurs sabres fauchaient les cous comme des blés...
« Et des têtes en sang fleurissaient les crinières
« Des chevaux !... et les poings des Ducs échevelés !...