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C'est surtout lorsqu'il y va de notre amour propre que nous avons le courage de nos opinions.
Nous avouons notre faiblesse, mais nous ne manquons pas de l'appeler faiblesse humaine.
L'amour-propre est une pièce de monnaie dont l'orgueil est face, tandis que la vanité est pile. La vanité est de l'amour-propre mal placé.
L'orgueil a cela de bon qu'il distrait l'homme de sa faiblesse.
La modestie est un amour-propre réglé par la raison.
L'hypocrisie et la franchise sont deux modes de l'amour-propre.
Lorsque nous avons reconnu nos torts, nous pensons avoir plus fait que si nous ne les avions pas eus.
Le souvenir des plus cruelles souffrances morales ou physiques est moins désagréable que celui de minimes piqûres de l'amour-propre.
On sent plus vivement la honte d'être ridicule que celle d'être coupable.
Le cœur pardonne souvent, la raison parfois, l'amour-propre jamais.
Nos déchéances n'ébranlent pas notre amour-propre.
II n'y a qu'une excuse à l'ingratitude, mais elle est bonne : c'est l'humiliation que l'on éprouve d'avoir été obligé.