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Laisse la rue à ceux que leur âme importune.
Calme, respire au long d'un grand soir de satin
Le lys de solitude à ton balcon hautain ;
Et joue avec les blonds cheveux de la Fortune.
Tas d'affamés serrés à la table commune,
Laisse aux autres leur part hâtive du festin,
Cependant que fleurit dans le parc incertain
La rose de cristal qui chante au clair de lune.
Au fond du Sanctuaire, entends l'art Sybillin
Prophétiser ton âme ― et vers l'Œuvre divin
Lève ton cœur ainsi qu'un ciboire d'or fin !
Pense, domine l'Âge et respire l'Espace.
N'espère pas : l'Espoir est un oiseau rapace.
Vis, si tu peux, dans l'Éternel l'heure qui passe.
Albert Samain