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servir, dans son horreur de bête coriace, aux mâchoires assez solides pour y mordre et aux palais assez grossiers pour y trouver du goût.
  Les gâte-sauce russes ne se sont pas mis en frais d'invention. Créer un art littéraire national, à quoi bon! Il leur parut bien suffisant de démontrer l'existence de la Russie par de gros récits familiers où défilerait la foule des gens rencontrés quotidiennement sur le terroir monotone des campagnes ou dans les rues maussades de Saint-Pétersbourg ou de Moscou: tchinovniks de tous les degrés, nobles, petits nobles, marchands, officiers, popes, moines et le troupeau imbécile des paysans, avec leurs habitudes, leur langage, leur grouillement banal et bête, leurs pauvres intrigues, leurs innombrables verres de thé et leurs plus innombrables petits verres de vodka. Et le bel œuvre commença, se développa, se continue et se poursuivra longtemps, devenant de plus en plus plat à mesure que s'émousse ce que l'entreprise pouvait d'abord avoir de nouveauté. On assista, on assiste encore à ce spectacle mais de la Russie mangeant, buvant, se soulant, faisant des affaires, vendant, achetant, cultivant son blé, se mariant, procréant des enfants, causant de balivernes, chassant, jouant au wint et volant des roubles, dans le train-train ordinaire de la vie — de la vie russe, ce qui est le comble du train-train ordinaire.
 Et il ne faudrait pas croire que ce soit là du réalisme. Si l'on emploie ce terme pour cataloguer les produits de ce côté-ci de la Vistule, c'est que le mot patronillisme n'existe pas. Il y a autant de différence entre le réalisme et la façon dont les Russes se servent d'une plume, qu'entre les tableaux de François Millet et de Théodore Rousseau, par exemple, et les photographies que les amateurs en promenade tirent des paysages de Barbizon. L'écrivain russe ne voit que la vie réelle, et cela non comme moyen d'art, mais comme but. Il ignore profondément ce que c'est que de faire naître une impression par une description, une scène, un type, un récit. Pour lui, un personnage n'est autre chose que monsieur un tel, dont il vous raconte bêtement l'histoire sans couleur, sans relief, sans dessous, sans atmosphère, et qu'il vous présente comme on vous présente dans l'existence civile des tas de gens, qui intéressent ou n'intéressent pas, pour pouvoir causer d'eux, cancaner sur leur compte, dévoiler leurs petites affaires, narrer leur mariage, leurs aventures, leurs vicissitudes, les plaindre ou se moquer d'eux, suivant que l'on est porté au sentimentalisme ou à la raillerie. Ce n'est pas autre chose que du reportage sur des individus qui n'ont ordinairement pas même le mérite d'être historiques ou simplement connus de vous. On ne peut se faire une idée, en Europe, où les écoles réalistes n'ont jamais cessé de rester littéraires — quel que soit d'ailleurs le jugement qu'on porte sur elles — l'inconcevable gargouillement auquel se complaît la prose russe. Le réalisme n'est point la négation de l'art: c'est, au contraire, une forme de l'art. On a le plaisir, chez un romancier français, anglais, allemand, d'admirer les proportions de

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