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peau de plaisance, un son d'aubaine, un goût puis un parfum prisables de fruit défendu.
Cette extrême sensibilité fit de mon Âme une orpheline qui longtemps pleurera ses Illusions assassinées dans la forêt des Expériences, une orpheline dont la patrie chère est la Solitude : domaine vaste, ainsi que la Charité, commençant où ne sont pas les Hommes, cessant où je ne suis plus seul, et qui se manifeste sur la montagne, sur la mer, dans la plaine, hanté par les Choses miraculeuses dont j'aime la seule éloquence, les Choses qui se taisent pour mieux exprimer.
Aussi, fuyant l'exil de Tout-le-monde, volontiers je retourne en la patrie d'élection : quotidienne promenade.
D'habitude l'errant est solitaire, mais ce soir je me sentis moins léger, comme d'une présence invisible à mon bras appuyée.
J'avais une Compagne présumable et je reconnus dans une certaine mesure, malgré ses facettes nombreuses, telle Revenante de mon propre Mémorial indiquant ensemble la Complice de ma jeunesse arlequine et les diverses bateleuses de ma nudité, — c'est-à-dire cette synthèse : la Femme.
Seul à deux, parmi la Nature de laquelle essorait une vie réparable, nourricière, consolatrice, notre pensée s'arrêta mêmement sur ces tombes vivantes, les Choses...
Or je parus dire à ma Compagne prismatique :