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leurs prunelles, ils doivent être joyeux. Et nous aussi, nous sommes joyeux ! nos légendes content que lorsqu'un de ces hommes divins — ainsi s'appelaient-ils, ainsi les saluaient leurs crédules victimes — disparaissait, les cloches sonnaient des accords funèbres, mêlant des pleurs d'airain aux sanglots des endeuillés.
Les cloches sont brisées, ils se sont enfuis, les sons d'épouvante. Nous les avons entendues, hélas ! vont-elles renaître, les cloches dont on avait arraché la langue !
Non ! Vénérables, les cloches mutilées se sont tues à jamais.
(A toute volée, par les deux, les cloches tintent, la foule ne les entend pas.)
Hosannah ! Hosannah aux reines d'éternité ! l'Absolu frémit ! Vers lui retourne l'émanation suprême ! Ame sainte, écoute la plainte dernière du corps que tu désertes. Gloire et joie, Infini, viens à l'Infini !
Hosannah ! Vierges de pur métal que Faust impénitent redoutait dans sa solitude, douces martyres à la bouche violée par les hommes, vous qui avez reçu Faust reconquis, à l'orée des pourpris sidéraux! Hosannah ! messagères évocatrices des paternelles dilections !
(A toute volée les cloches tintent encore, puis leurs harmonies sonores se dissolvent en volutes et s'éteignent.)
Nos hérauts, pour la dernière fois, feront retentir le cuivre des clairons ; pour la dernière fois, car il est bon que même ces voix cessent d'être ouïes.
(Les hérauts embouchent la trompette et clament.)
Triomphe et gloire de nos vœux accomplis.
Nous les avons vaincus les geôliers des spasmes francs ; les détenteurs des impavides ivresses, et maintenant nous n'entendrons plus leurs chansons spoliatrices du réel. Disparus, ceux qui connaissaient les