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d'un volume de vers. J'en offre cent mille livres, Madame, cent mille livres.
 Colombine. — Cent mille livres !... Ah! pauvre Pierrot! oh! oh !...
 Polichinelle. — C'est pour rien.
 Un homme. — On trouve peu de génies comme le sien.
 Un autre. — Ah ! certes, son nom sera immortel!
 Un autre. — Il faudra lui élever une statue!
 Un autre. — Je m'inscris pour mille francs sur la liste de souscription!
 Un autre. — Je veux interpeller la Chambre pour que l'Etat lui fasse des funérailles publiques!
 Arlequin. — Je ferai son éloge à la prochaine séance de l'Académie, et je dirai ce qu'on a dit de Molière: Rien ne manque à sa gloire... Je parlerai sur sa tombe!
 Colombine. — Hélas ! ah! ah ! ah ! mon pauvre mari !... mon pauvre mari !...
 Tous. — Pauvre Pierrot! Malheureux Pierrot!
 M. Barbin. — Je veux faire de ses œuvres une édition nationale. Arlequin, Pierrot était votre ami, consolez sa femme, éloignez-la de ce lieu sinistre!
 Arlequin. — Viens, Colombine. (Il l'entraîne.)
 Colombine. — Si l'Etat prenait les funérailles à sa charge, ce nous serait une sérieuse économie.

G.-Albert Aurier.

(1) Pièce en un acte complètement charpentée, mais non écrite : Albert Aurier avait l'intention de la mettre en vers, ainsi qu'en témoigne le fragment que nous publions plus loin en note. — A. V.
(2) Nous avons trouvé dans les papiers d'Albert Aurier un fragment du monologue de Pierrot mis en vers. Le voici:

Tiens ! la Lune!... Bel astre au rire de corail,
Oh ! Dis-moi, douce Lune, es-tu le soupirail
De ce navrant caveau de boue et de ténèbres
Où nous vivons nos riens grotesques et funèbres ?...
Es-tu le soupirail ouvrant sur l'Infini,
L'indulgent soupirail, radieux et béni,
Qui laisse ruisseler jusqu'en nos noirs cloaques
L'or des rayons divins et paradisiaques?...
O soupirail, Espoir des poètes maudits,
Lucarne qu'illumine un peu de paradis,
O mystique lucarne aux flamboiements étranges
Qui nous fais entrevoir le blond pays des anges,
Lune, cher réconfort du mortel voyageur,
Que j'aimerais, donnant, ainsi qu'un bon nageur,
Un fort coup de talon aux limons de la terre,
Monter dans les flots bleus vers l'éternel mystère,
Monter, monter parmi les océans d'azur,
Et traverser ton orbe éblouissant et pur !...
Cœur joyeux bondissant vers la Splendeur première,
Que j aimerais crever ton disque de lumière
Ainsi qu'un clown de cirque, en son grotesque saut,
Crève le papier d'or d'un rutilant cerceau!...
Mais, dans ce monde bête où l'aveugle Fortune
Me jeta par erreur, faire un trou dans la Lune
Est scandaleux, qu'on soit poète ou financier.
Eh! oui, qu'on soit artiste ou qu'on soit épicier,
II faut faire son trou comme le stercoraire !...
C'est la mode du lieu!... Et, d'ailleurs, ce libraire,
Je crois, avait raison!... Son dire était exact!...
C'est un homme sensé, plein d'esprit et de tact,
Un bon garçon un peu coquin, mais très honnête;
En somme, un brave, grave et sage proxénète '...
Ce bon Monsieur Barbin, sans doute, avait raison
De t'offrir, ô Pierrot, de faire en sa maison,
Qu'encombrent les talents reliés en basane,
Le doux et lucratif métier de courtisane!
Ah ! la belle façon de comprendre notre art !...
On fait la fille! On va sur le grand boulevard,
Exhibant des mollets et dardant des œillades
Pour raccrocher les vieux quêteurs de rigolades.
Eh ! quoi ? Comment? Pierrot, tu dédaignes l'argent
Que t'offre un homme honnête et fort intelligent
Pour brocanter la chair de ton rêve et te vendre?...
— Me vendre! Serviteur !... J'aimerais mieux me pendre.
J'ignore l'art de maquiller mes pauvres vers
Au goût des amateurs quelconques et divers,
De faire le trottoir ou même la fenêtre !...
— Me pendre?... J'y serai bientôt forcé, peut-être !...
Car que fais-je, en somme, ici-bas? En vérité,
C'est par distraction que les Dieux m'ont jeté,
Pauvre aiglon envolé, sans plumes, de son aire,
Dans ce monde grotesque où je n'avais que faire,
Sur cet astre boueux, parmi ces vils marchands
Dont j'ignore la langue et qui raillent mes chants.
— Ah! mes illusions!...Chères fleurs bien fanées !...
Hélas ! Pauvre Pierrot, voici quaranteftmnées
Que tu traînes tes fers au bagne d'ici-bas !...
Les huissiers ont vendu ta guitare et tes bas,
Le boulanger n'a plus pour toi pain ni farine,
Ton front pâle et fripe de rides se burine!...
Où sont tes gestes fous et tes jarrets nerveux?...
Il a neigé parmi la nuit de tes cheveux !...
Qui se souvient encor de ta mine replète ?...
Te voila plus étique et plus sec qu'un squelette,
Et ce blanc vêtement, pur tissu de candeur,
Qui, jadis, te faisait plus fier qu'un commandeur,
N'est plus sur ton échine avachie et piteuse
Qu'une loque sordide et bien calamiteuse !...
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